Les ères astrologiques

Avant de poursuivre mes explications sur l'évolution de l'astrologie à travers les périodes et les civilisations, il m'est nécessaire de parler d'un sujet très important. Le sujet en question est en rapport au culte de Mithra, un culte à mystère qui a donné naissance à ce qu'on appelle aujourd'hui les ères astrologiques. Mithra est une divinité qui fut vénérée chez les peuples du Moyen-Orient et d'Inde avant d'atteindre l'Occident. La représentation picturale traditionnelle qui en est faite est celle du guerrier qui sacrifie un taureau. D'après de nombreux historiens et exégètes, le culte de Mithra serait remplit de symbolisme qui pourrait nous renvoyer directement aux constellations et plus particulièrement aux cycles de notre Univers. L'histoire symbolique qui nous est raconté est présentée sous la forme d'une animalisation des constellations. Ce qu'il faut retenir de cela, c'est qu'en prenant le taureau comme exemple, le culte mithraïque nous a fait comprendre de manière métaphorique que la tauroctonie (sacrifice d'un taureau) marquait la fin de l'ère du Taureau pour laisser place à une nouvelle ère, l'ère du Bélier. 

Ce qui est dommage, c'est qu'il n'y a pas de date précise qui pourrait permettre aux chercheurs de situer dans le temps, le sacrifice du taureau. Cela donne lieu à de nombreuses interprétations différentes quant à savoir à quel moment a réellement débuté l'ère du Bélier. D'après les données historiques, c'est en l'an 2150 avant Jésus Christ que commença l'ère du Bélier, ce qui nous fait logiquement remonter le culte de Mithra à peu près à cette période. Ce changement d'ère était perçu comme une période de grand bouleversement socio-politique par ces anciennes civilisations (perses, hindoues, etc...). 

D'un point de vue astronomique, cela se caractérise par le déplacement du point vernal (équinoxe de printemps) dans la constellation du Bélier. Pour ceux qui ont suivi jusqu'ici (et ont lu la 1ère partie), il est légitime de se demander: comment cela se fait-il que le point vernal recule par rapport au déplacement des planètes sur l'écliptique ? (relire mon premier article sur l'histoire de l'astrologie pour comprendre l'écliptique). Ce qu'il faut savoir, c'est que le déplacement du point vernal suit la même trajectoire que l'inclinaison de la Terre lors de la précession des équinoxes (relire la précédente partie). Comme cette trajectoire est contraire aux mouvements des planètes, on a donc l'impression de reculer d'une ère plutôt que d'avancer d'une ère.  

Je vais maintenant y ajouter l'aspect des nombres et de l'arithmétique pour synthétiser le fonctionnement de la précession des équinoxes dans le temps. Pour commencer, l'axe de la Terre s'incline de 1° tous les 72 ans par rapport à l'écliptique. Chaque signe astrologique s'étend sur une durée de 30 jours. Ainsi, si l'on multiplie le temps qu'il faut pour que l'axe de la Terre s'incline (72 ans) avec le temps qu'il faut pour que la Terre parcourt l'ensemble d'une constellation (30 jours), on obtient la valeur de 2 160 ans. On change donc d'ère astrologique tous les 2 160 ans. Mais, pour que la Terre effectue un cycle complet, il faut que son inclinaison revienne à son point de départ. Pour cela, il faut multiplier le nombre d'années correspondant à un changement d'ère (2 160 ans) avec le nombre de signes astrologiques (12). Ce qui nous amène à 25 920 ans. Mais bon, même si ce calcul semble précis, il ne l'est en fait pas totalement, puisque le système astrologique en place actuellement ne tient pas compte que chaque constellation est traversée par le Soleil pendant une période inégale. Par exemple, comme la constellation des Poissons est traversée en 37 jours par le Soleil, 37*72 donne 2 664 ans. Tout comme la date admise concernant le début de l'ère du Bélier, le début de l'ère des Poissons est sujet à controverse. D'après mes calculs, l'ère des Poissons pourrait avoir commencé en -62 avant J-C. Ceci m'amènerait alors à l'an 2592 pour le début réel, d'un point de vue astronomique, de l'ère du Verseau. 

D'après les anciennes civilisations, le changement d'ère provoque toujours un renouveau. Ce qui était néfaste est détruit pour être transformé en quelque chose de nouveau. D'un point de vue historique, on a observé que l'énergie symbolisant chaque signe astrologique, s'est manifesté avec force depuis des temps immémoriaux. Par exemple, l'ère du Lion coïnciderait avec une longue période de réchauffement climatique (le feu en action) qui se serait produite il y a environ 10 000 ans. L'ère du Cancer fut marquée par le Déluge (l'eau en action) et la sédentarisation des peuples: on se regroupe pour créer des villages et se réfugier sous un toit. L'ère des Gémeaux fut marquée par l'invention de l'écriture et des différents langages (l'air en action) pour faciliter la communication entre les peuples. Je peux continuer ainsi jusqu'à l'ère des Poissons qui fut, de son côté, hautement marquée par une spiritualité manipulée par les religions. Ceci démontre sans aucun doute que les constellations couplées à l'inclinaison et au déplacement de la Terre ont un impact direct sur notre évolution, l'énergie des étoiles de chaque constellation nous influençant non seulement individuellement mais également collectivement.

Astrologie hellénistique

Le système astrologique actuel nous vient de la Grèce Antique. Il est arrivée en Occident aux alentours du Vème siècle avant J-C. Tout commence avec un érudit et philosophe grec du nom d'Empédocle qui vint nous transmettre la connaissance des quatre éléments fondateurs de l'Univers: le feu, l'air, la terre et l'eau. Ceci constitue le point de départ de la redécouverte de l'astrologie en Occident. Aux environs de la même époque se construit, dans l'école de Pythagore, une relation entre les planètes de notre Système Solaire considérée comme "bénéfique" ou "maléfique" en fonction de l'angle qui les sépares. Cela créa ce qu'on appelle aujourd'hui les "aspects facilitants" (trigone et sextile), les "aspects difficiles" (carré et opposition) et l'"aspect neutre" (conjonction). 

Peu de temps plus tard, aux environs du IVème siècle avant J-C, le grand médecin Hippocrate nous apporte la notion de tempéraments qu'il théorise dans ce qu'il appelle "la théorie des humeurs". Il dénombre quatre tempéraments qu'il associe aux quatre éléments et à quatre glandes ou organes de notre corps. Les quatre tempéraments sont: bilieux (feu/bile jaune/foie), sanguin (air/sang/coeur), nerveux (terre/bile noire/rate) et lymphatique (eau/système lymphatique/glande pinéale). Pour résumer, Hippocrate explique que nos organes sont influencés par le rythme des saisons et leur qualité: chaud, froid, sec et humide. Il propose, en conséquence, un régime alimentaire qui s'adapte aux besoins saisonniers de notre corps: manger froid pendant l'été, manger chaud pendant l'hiver. Cette théorie établit une passerelle entre l'astrologie, la biologie et la médecine. Elle comprend donc un aspect holistique. Les naturopathes s'en sont inspiré pour créer leur propre modèle. Aristote reprendra ces quatre éléments pour les faire correspondre aux astres célestes en astronomie.

Ensuite, au IIIème siècle avant J-C, fut inventé le premier système de maisons astrologiques, que les grecs appellèrent "domification" ou "système des maisons-signes". Etant donné que l'astrologie est fondée sur l'astronomie, il s'appuyèrent sur la durée de rotation de la Terre sur elle-même (24h), ainsi que de celles des journées, pour faire correspondre les maisons astrologiques. Par exemple, la maison I correspond à l'ascendant qui signifie le lever du soleil (soleil ascendant) et la maison VII (son opposé) au descendant, qui renvoie au coucher du soleil (soleil descendant). Quand le Soleil est au plus haut, à son zénith, il se trouve au "milieu du ciel" et quand il est au plus bas, à son nadir, il se trouve au "fond du ciel". Cependant, la taille des maisons est inégale puisqu'elle varie selon la position géographique d'une personne au moment de sa naissance. Un peu plus tard, au IIème siècle avant J-C, le terme d'ère astrologique fit son apparition avec Hipparque dans le monde grec.

Au IIème siècle après J-C, l'ensemble de ces connaissances furent rassemblés dans une suite d'ouvrage faramineux portant le nom de Tetrabiblos. Le Tetrabiblos est une série de quatre livres consacrés exclusivement à l'étude de l'astrologie. L'homme qui est à l'origine de son écriture fut considéré comme le plus grand encyclopédiste ayant vécu en Grèce Antique et s'appelle Claude Ptolémée. Il y rassemble et synthétise les notions astronomiques d'Aristote et de Pythagore, relatives aux aspects qu'elles forment entre elles et à leurs qualités. La seule notion nouvelle qu'il vient ajouter à tout cela se rapporte à ce qu'on appelle les "dignités planétaires". Ce qu'il nous explique est que chaque signe astrologique se trouve en affinité avec l'un des sept astres considérés comme des planètes en astrologie: le Soleil, la Lune, Mercure, Venus, Mars, Jupiter et Saturne. Par exemple, il considère que l'énergie du Soleil et son rayonnement représente parfaitement les caractéristiques du signe du Lion. C'est ainsi, que s'est développé ce qu'on appelle le placement "en domicile" des planètes. Bien plus tard, certains astrologues professionnels iront plus loin en parlant de planètes "exaltées", "en chute" ou "en exil". Mais bien sûr, si l'on parle encore beaucoup de l'influence de Ptolémée sur l'astrologie moderne, c'est parce qu'il a mis en avant un nouveau modèle astrologique, qu'il a appellé "astrologie tropicale", sur lequel se repose de nombreux astrologues de nos jours. La principale raison qui explique sa volonté de transformer le système astrologique sidéral prédominant à son époque est qu'il considérait que ce n'était pas la Terre qui tournait autour du Soleil mais l'inverse. C'est en observant la trajectoire du Soleil qu'il eut l'idée de ce zodiaque. En partant de ce principe, il traça deux lignes virtuelles parallèles à l'équateur terrestre qu'il appela "tropique du cancer" et "tropique du capricorne". Celles-ci se trouve à une distance de 23° de l'équateur et sont censées signaler le solstice d'été et le solstice d'hiver. L'astrologie tropicale se fonde en partie sur les tropiques mais aussi les équinoxes. C'est pour cela que l'on considère que l'astrologie tropicale est saisonnière: elle s'occupe de la position du Soleil dans le ciel lors de chaque saison. Il n'y a donc pas de correspondance directe avec les constellations, comme c'est le cas dans l'astrologie sidérale. Son point faible principal, qu'il est nécessaire de relever ici, est que l'astrologie tropicale s'occupe d'analyser exclusivement le déplacement du Soleil dans l'hémisphère nord, ce qui écarte naturellement l'hémisphère sud de l'équation (Ptolémée habitait à Alexandrie à ce moment-là). Mon objectif est d'essayer de trouver un moyen pour faire concilier l'astrologie sidérale avec l'astrologie tropicale.

L'écroulement de l'astrologie

Au cours du Moyen-Age, puis pendant une grande partie de la Renaissance, l'astrologie n'était pas une priorité en raison des différentes guerres qui faisaient rage à ces époques, ce qui lui fit perdre de sa splendeur. Les meilleurs ouvrages sur le sujet, comme le Tetrabiblos de Ptolémée, furent traduit en plusieurs langages ce qui permit leur diffusion auprès de la population. Si quelques scientifiques comme Johannes Kepler ou le mathématicien italien Placidus (qui donna son nom au système placidus de l'astrologie moderne) ont fait perduré encore un certain temps l'intérêt que la population portait à l'astrologie, les philosophes du siècle des lumières et la montée de la rationalisation mirent à mal l'astrologie. Une scission totale entre l'astronomie et l'astrologie s'effectua au XVIIème siècle et continua à s'agrandir jusqu'au XXème siècle. L'astrologie se fraiera alors doucement son chemin dans les enseignements ésotériques de quelques sociétés secrètes pour finalement revenir de plus belle à notre époque grâce aux réseaux sociaux.